À quel moment de l’histoire, l’humanité est-elle devenue une société de grands bébés nourris au Coca-Cola, à l’alcool et dopés par les drogues de synthèse ? La question a au moins le mérite d’exister…
Que ce soit dans la série Extrapolations ou dans les dessins animés La terre de Willy, l’audiovisuel n’arrête pas de nous nourrir de l’évidente répercussion des actions humaines sur la planète. Malgré leur succès, il nous semble difficile de comprendre qu’ils n’ont rien d’une science-fiction et dans l’apocalypse qu’ils dépeignent, nous en sommes les acteurs principaux.
Malgré ces évidences, les rapports du GIEC nous démontrent que si ces scénarios sont réels, ils sont tout à fait réversibles si des actions à fortes retombées sont mises en place sans attendre. Associer la tragédie écologique et la santé humaine semble être une réflexion difficilement compréhensible. L’exercice, bien que nouveau dans l’imaginaire social, est évidemment nécessaire.
Parler d’environnement c’est parler de la survie ; parler de la survie, c’est parler de santé ; et parler de santé, c’est parler de nos modes de consommation, entre autres, et surtout alimentaires.
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La question me frappa lors de mon arrivée au bureau, au moment de prendre mon café matinal : quel est l’impact écologique de la fabrication de mon café péruvien préféré ?
La question m’interrogea au point de décaler mon premier rendez-vous pour me dédier à la lecture du sujet. Résultat ? J’étais époustouflée par la quantité d’informations qualitatives sur les questions de la consommation alimentaire que jusque-là j’ignorais. J’ai lu ensuite des dizaines d’articles scientifiques et trouvé des livres sur ce thème. Entre autres, Le suicide de l’espèce du brillant Jean-David ZEITOUN. Dans cet ouvrage, l’épidémiologiste explique comment nos modes de consommation et de fabrication alimentaires impactent de manière étroite l’environnement et notre santé.
Il n’est pas le seul à défendre cette théorie. D’ailleurs, le dernier rapport du GIEC s’attaque en particulier à nos modes de consommation.
Les questions comme : pourquoi les conditions humaines produisent-elles les maladies les plus dangereuses ? Est-ce qu’on peut gagner en qualité de vie et en espérance de vie en mangeant mieux et des produits de meilleure qualité, sans pesticides, en circuit court, avec moins de produits transformés, moins d’alcool, et l’arrêt de tout type de drogues ? Les réponses me semblent évidentes, mais dans une société faite pour nous endormir, ces questions semblent presque surprenantes.
En premier lieu, il est intéressant d’apercevoir que la médecine progresse plus que jamais. Toutefois, en contrepartie, la santé humaine se dégrade, et cela, sans surprise, car malgré les différents investissements dans la recherche et le développement, nos modes de vie sont nocifs pour notre santé physique et mentale. Sans compter que notre environnement est, lui aussi, pollué dans tous les sens du terme.
La santé ne suit pas le même cycle évolutif que la médecine : elle a besoin d’environnement. Ce qui se justifie par la stagnation, voire le déclin, des niveaux de santé mondiale depuis quelques années. Certaines de ces données sont difficiles à mesurer, disent les experts. Mais certains critères sont facilement repérables comme la durée de vie et les chiffres démontrent un déclin dans les pays développés. Ce serait un véritable paradoxe si le sujet en question n’était pas justement celui des modes de consommation et non du manque d’accès. En occident, les mauvaises habitudes alimentaires, la quantité d’aliments transformés sont plus importants.
Dans le livre Le suicide de l’espèce, Jean-David ZEITOUN présente différents risques pour la santé dans les années à venir. Un a particulièrement attiré mon attention : la pollution de l’air et de l’eau.
En définition, la pollution est tout ce que nous transférons dans l’environnement et qui impacte notre santé de manière directe ou indirecte. Considérant cela, la pollution de l’environnement est un risque épidémiologique pour l’instant limité, mais qui tend à se développer dans les années à venir.
Si l’on schématise, nous pouvons les partager en deux : la pollution ancienne traditionnelle (l’eau, l’air intérieur des foyers – cette pollution est liée au développement) et la pollution moderne (l’air extérieur et chimique – qui est en croissance dans le monde, entraînant des maladies courantes dont il est difficile d’identifier la gravité – causant souvent des maladies atypiques, par exemple des maladies cardiovasculaires, des troubles du développement des enfants, des troubles hormonaux chez les femmes).
Quand quelqu’un a un cancer du poumon, nous allons intuitivement chercher des causes individuelles comme : est-ce qu’il fumait ? Est-ce qu’il faisait de l’exercice physique ? Est-ce qu’il mangeait bien ? Oubliant parfois, voire habituellement, les facteurs extérieurs que nous savons à ce jour désastreux.
De plus, une grande quantité de nos maladies sont liées à des aliments ultra-transformés : les chips, les pizzas de supermarchés, les bâtonnets de poissons, etc. Rajoutons dans la liste les aliments bourrés de pesticides. Rappelons que l’obésité représente 1,2 million de morts en Europe chaque année. À l’échelle mondiale, le nombre de cas d’obésité a presque triplé depuis 1975. En 2016, plus de 1,9 milliard d’adultes – personnes de 18 ans et plus - étaient en surpoids. Sur ce total, plus de 650 millions étaient obèses.
La dangerosité des pesticides est indiscutable, mais il y a un manque de débats sur la part de responsabilité de ces pesticides et leurs incidences précises sur la santé de l’homme. Les spécialistes disent qu’il est quasiment impossible de déterminer la part de chaque facteur sur la santé. Toutefois, savoir qu’il y a des répercussions et que l’accumulation de ces facteurs est un sujet de survie serait déjà largement suffisant pour que des mesures sociopolitiques et transatlantiques globales soient prises. Sur ce modèle, nous remarquons une faute.
Les estimations (en considérant une marge d’erreur) prédisent que ce sont des centaines de milliards d’euros qui devront être investis pour contrebalancer les préjudices de ces maladies. Nous parlons de près de 3% du PIB. Par exemple, afin de traiter l’obésité, ce sont 11 milliards € de dépense par an. Ces résultats sont forcément sous-estimés, car ils ne prennent pas en compte la perte de productivité liée aux arrêts de travail, ainsi que les autres maladies conséquentes à l’obésité.
En résumé, nous pourrions dire que les industries ont une responsabilité dans la pollution environnementale et dans la santé mondiale, mais que cet impact est rééquilibré par les bénéfices financiers qu’elles apportent – afin de financer l’État, qui lui, finance l’éducation, la santé et le travail. Erreur ! Car au-delà de la controverse que ces chiffres peuvent présenter, il serait grand temps de mettre l’homme et les intérêts du vivant dans le centre des intérêts économiques.
Il est important de préciser que le changement climatique n’est pas un risque spécifique. Cependant, il aggrave une situation déjà périlleuse – avec des effets directs et indirects comme le réchauffement climatique, les maladies cardiovasculaires, les malformations fœtales, le stress psychologique, etc.
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Le 20e et le 21e siècle ont été marqués par quatre pandémies, phénomène auquel nous n’avons jamais assisté auparavant dans toute l’histoire de l’humanité. Si l’on veut faire une transition environnementale, la question épidémiologique est une partie indissociable d’un problème de santé publique et de survie de notre espèce.
Ces transitions, épidémiologiques et environnementales, devront se faire ensemble. Les deux problèmes sont complémentaires. La solution devra être complémentaire.
Il nous faut sans aucun doute une alimentation plus végétale et moins industrialisée. Le transport est également une bonne illustration des changements à faire. Si nous achetons des légumes du Brésil, le contrecoup du transport de ce légume est inhérent à notre santé et à l’environnement. Des exemples comme celui-ci, il en existe des dizaines d’autres.
Malheureusement, le modèle d’association entre environnement et santé est difficilement assimilable, car même si le sujet environnemental commence à être répandu dans la société, la mobilisation et la pleine conscience de l’urgence sont encore faibles. De plus, si ces sujets ne sont pas traités de manière transatlantique et géopolitique, ils n’auront que peu de résultats, considérant l’urgence du sujet. Nous sommes ici sur un sujet de santé mondiale.
L’autre critique ignorante du modèle est le « prix ». Or le coût de la transition épidémiologique n’a pas de coût pour le service public et cela semble coûter moins cher pour la population civile.
Deux exemples sont facilement assimilables :
La transition de nos modes alimentaires peut coûter moins cher pour le consommateur.
EX. Remplacer un steak tartare (17€) par un fromage de soja Tofu (4€) en cycle court.
Si nous faisions l’équation du coût d’un patient ayant un cancer du poumon ou le coût d’une chirurgie afin d’endiguer une obésité contre le coût d’investissement public (prime panier de fruits par exemple) qui motiverait la société à consommer plus de fruits et de légumes en circuit court, sans doute, cela serait avantageux au trésor public. Cela nous permettrait de sortir de cette évidence erronée qui nous fait croire que plus vous avez de capital économique, plus vous mangez bien.
La transition épidémiologique n’a pas de besoin technologique.
EX. : Nous n’avons pas besoin de l’innovation et des ressources de recherche pour savoir comment faire, puisque l’histoire nous a déjà présenté des éléments de réponse. Alors que pour la transition environnementale, nous multiplions les recherches afin de découvrir quels sont les moyens pour diminuer notre impact.
En réalité, l’histoire nous a appris ce qu’il faut faire au sujet de la santé publique. Le tabac est un risque que nous avons su faire baisser avec l’intervention légale (régulation) et économique (taxation). Cela va plus loin que de considérer l’augmentation des prix, cela inclut l’interdiction de communiquer sur la cigarette, de faire de la publicité, de travailler sur des effets marketing du produit, de le promouvoir sur des évènements. Ce sont de bons exemples de ce qui devrait être avec la pollution chimique, les énergies fossiles, la surconsommation, les transports, l’alimentation, la mode et toutes autres industries à incidences environnementales.
L’accès à la viande, aux produits modifiés (chips, barres chocolatées, etc.) devrait être sous les mêmes contraintes pour tous, de sorte à diminuer l’impact sur la santé publique, donc sur le vivant.
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D’autres actions comme la mise en place d’un Nutri Score présentent des résultats dont l’efficacité est globale. Si je suis conscient qu’un produit est moins désastreux pour ma santé qu’un autre, mais que celui qui est le plus délétère est le seul que je puisse me payer, la question ne se pose pas. C’est là où nous en sommes, rajoutez à cela un contexte inflationniste, une baisse du pouvoir d’achat, une lutte des classes et la difficulté d’accès à des produits de bonne qualité pour certains qui sont déjà la catégorie sociale la plus atteinte par les conséquences environnementales, sociales, épidémiologiques, ne sont pas la voie de la justice sociale.
Au niveau de la régulation, l’idéal serait l’interdiction de circulation de certains produits dangereux, mais la mise en place reste difficilement possible. D’autres actions comme interdire le fructose, qui est un sucre particulièrement dangereux pour la santé, serait une action de force majeure. Dans certains pays/états (l’état de NYC par exemple) a été effectué un test démontrant l’efficacité épidémiologique. D’autres actions comme interdire la publicité pour certains produits et enseignes, interdire l’ouverture de certains modes de restauration, une taxation des mauvais produits pour la santé rendant leur accès plus difficile, interdire le positionnement de certains produits sur certaines zones du supermarché – car son positionnement est étudié pour motiver l’achat - sont des mesures plus facilement applicables.
Nous constatons une certaine hypocrisie dans l’industrie alimentaire. Depuis des années, des gouvernements du monde entier sont alertés des risques liés à l’alimentation et pourtant, nous avons choisi de laisser le risque prospérer. Ce n’est pas le seul facteur qui déséquilibre tout l’écosystème, nous le savons, mais c’est sans doute celui qui a le plus fort retentissement.
Freiner ces industries pose un autre problème de politique publique : comment sortir de ces techniques industrielles et gérer la perte d’emploi et la perte de revenus publics qu’elles génèrent ?
La valeur économique brute est un produit dépassé, nous sommes plusieurs à le dire. Mais, elle a tout de même le mérite d’exister. Toutefois, si nous considérons l’effet préjudiciable de ces entreprises pour l’environnement, pour la santé du vivant par leur existence et leur production, si nous mettons cela en adéquation, il est évident qu’il y a un véritable intérêt à les interdire et à développer d’autres industries à la place ou à former les gens à d’autres métiers. L’investissement par ce biais serait équitable, voire positif (calcul à effectuer en détail).
C’est un fait. C’est l’économie qui mobilise le monde politique et géopolitique. Pour mobiliser les politiques publiques dans le sens du vivant, les calculs économiques sont une véritable nécessité pour mettre en évidence les répercussions de la non-action.
C’est un fait, le changement est impératif et l’action de l’humain trop peu importante pour faire changer la tendance. Dans cette évidence, ce sont aux leaders politiques, aux entreprises et aux chefs d’entreprise de prendre le relais et d’assumer leurs responsabilités.
En France, 99% du tissu entrepreneurial est composé des PME et TPE. Alors comment est-il possible que des exigences ne soient pas opérationnelles afin de justifier l’impact d’un domaine d’activité ? D’un marché ? D’un modèle économique ? Alors que nous savons qu’en moyenne 62% des PME ont au moins 20 salariés. Sommes-nous juste là pour pousser le citoyen à faire toujours plus alors que nous sommes confrontés - chiffres à l’appui - à la puissance de l’entreprise et à sa responsabilité ?
Les entreprises agiront quand le pouvoir politique les poussera à le faire. Pas avant. Nous le savons.
Les actions individuelles sont importantes pour le vivant, mais la solution se trouve dans les entreprises de toute taille, je pense particulièrement aux PME et TPE qui feront les choses lorsque les contraintes juridiques les pousseront à le faire. Le modèle est devenu institutionnel, il faut une pression politique importante afin que les leaders effectuent leur travail et développent une politique de moyen long terme en action immédiate. Ainsi, c'est là tout l’intérêt des activistes pour le climat, mais pas seulement, les chercheurs, les médias, les universités, tous, mènent vers le processus de conscientisation et de mobilisation de la société pour créer une pression politique et, en l’occurrence, géopolitique.
En réalité, il faut dire haut et fort à tout un chacun que le monde dans lequel nous sommes n’est pas au mieux pour nous et encore moins pour nous enfants. Agissons !
Il s’agit de responsabiliser chacun de la détérioration de notre santé.
La pollution chimique et l’obésité ne sont pas des causes naturelles, mais provoquées par l’homme. Il est possible de faire machine arrière. Il nous faut réformer notre modèle agricole, avec une bonne agriculture pour la santé, bonne pour le climat. Donc une agriculture qui produit sans pesticides, sans produit chimique, pour une population qui consomme moins. C’est un fait, nous mangeons trop.
Améliorer la santé des humains par des politiques publiques est souhaitable et possible. Se débarrasser du gaz, du pétrole, des produits chimiques est un chemin contraignant et parsemé d’embûches pour une société qui a été formatée ainsi. Mais, cela n’est plus un choix, c’est un cri d’alarme!
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